123 IM : Une écoconstruction au cœur de Paris
Une écoconstruction au cœur de Paris
Comment agrandir des bureaux dans un immeuble haussmannien tout en y intégrant des critères environnementaux du XXIe siècle ? Tenir compte de ces enjeux et des nouvelles façons de travailler – tels étaient les défis que souhaitait relever 123 IM lors du projet d’extension sur cour avec surélévation de 5 niveaux de ses bureaux situés dans la 9ème arrondissement de Paris. Matthieu Lott, architecte du cabinet Plugin studio et Aymeric Levesque, directeur général de Nexalia Métropole, promoteur immobilier, nous expliquent leur démarche de la conception à la livraison de cette extension réalisée en seulement 9 mois.
Ce projet est le fruit d’une collaboration étroite entre le client, le promoteur et leur architecte. Pouvez-vous nous en dire plus sur la phase de conception ?
Aymeric Levesque (AL) : Le cahier des charges de notre client exprimait trois exigences environnementales dont nous avons longuement discuté au lancement de la phase de conception.
D’une part, il voulait préserver et mettre en valeur les façades haussmanniennes existantes. Pour ce faire nous les avons conservées en l’état à l’intérieur des bureaux tout en ayant une transition fluide vers les nouveaux espaces à chaque étage. Cela nous a permis d’unir des matériaux nobles et naturels : la pierre et le bois.
Aussi, le client souhaitait réaliser le projet en écoconstruction et ce, à chaque étape de la construction. Nous avons donc opté pour une réalisation en ossature et planchers en bois car ce moyen de construction présente des avantages écologiques et énergétiques : c’est un matériau solide et naturel qui provient directement d’Europe, principalement d’Autriche. L’emploi de matériaux secs comme le bois permet de réduire la production de déchets et la consommation d’eau sur le chantier. C’est aussi le matériau qui participe activement à la lutte contre le réchauffement climatique et qui consomme le moins d’énergie.
Ensuite, le client visait une efficience énergétique supérieure à la norme réglementaire RT2012 afin d’être en ligne avec sa politique ESG, et de réduire son empreinte carbone.
Nous avons conçu le projet autour d’une performance énergétique dépassant la réglementation RT2012-10%, en renforçant l’isolation thermique par des matériaux écologiques et en intégrant la domotique pour un meilleur contrôle de production et de consommation d’énergie. Afin de mieux réguler la consommation électrique du bâtiment, l’agrandissement bénéficie de détecteurs de présence.
Enfin, le client voulait introduire plus de végétation.
Nous avons répondu aux attentes du client puisque nous avons créé deux espaces végétalisés. Les occupants pourront bénéficier de végétalisation avec un rucher afin de renforcer la biodiversité au cœur de Paris. Cette végétalisation permettra une meilleure approche du traitement des eaux pluviales, une meilleure isolation et un confort acoustique pour les occupants de l’immeuble.
Matthieu Lott (ML) : Effectivement, la végétalisation est un point très important dans la plupart des projets que nous traitons car il présente à lui seul 4 avantages : le 1er est de répondre avec la meilleure des méthodes au Plan « ParisPluie » mis en place par la ville de Paris pour valoriser les eaux de pluies récoltées en toiture, ce qui a un impact écologique très fort par l’absence de traitement de ces eaux mélangées aux eaux usées de la ville. Les chiffres sont vertigineux et la rétention des eaux de pluie en toiture est la réponse la plus efficace.
Le 2ème est d’isoler les toitures contre l’ardeur du soleil d’été, il suffit pour s’en convaincre de voir la toiture des réservoirs d’eau de la Ville de Paris qui est entièrement végétalisée et dont la température est régulée toute l’année de manière passive mais très efficace.
Le 3ème est de lutter contre les ilots de chaleur urbains, notion introduite par l’APUR (l’Atelier Parisien d’Urbanisme) – ce n’est pas anodin puisque le Plan « ParisPluie » estime à 2 à 3° l’abaissement de température localement.
Enfin le 4ème intérêt, et pas des moindres, est que la végétalisation permet de maintenir, voire de réintroduire, une biodiversité forte en ville. Les abeilles, les limaces, les coccinelles sont de retour à Paris, ce qui, par ricochet, fera revenir les oiseaux qui nous sont si chers !
Avez-vous tenu compte des enjeux environnementaux et sociaux durant la phase de chantier ? Pouvez-vous nous donner quelques exemples ?
ML : Le choix de la filière bois a tout de suite présenté tous les avantages vus plus haut tout en s’adjoignant les avantages d’une construction particulièrement rapide. Encore une fois, la localisation du projet a ajouté une contrainte liée au plan VIGIPIRATE et au bien-être des équipes de 123 IM, nous obligeant à souvent travailler les dimanches.
La filière bois nous a permis une grande vitesse d’exécution : un maximum de la construction bois étant fabriquée en atelier, il reste surtout un travail d’assemblage à faire sur le chantier. Ainsi toute la structure porteuse en bois et l’ensemble des planchers et des murs porteurs ont été montés en 2 dimanches 1/2 !
AL : De plus, les nuisances acoustiques des constructions bois sont très faibles. Etant en milieu occupé durant l’ensemble du chantier cela nous a permis de réduire la propagation de poussière et de bruit.
Afin d’avoir un réel suivi technique du chantier dans le but d’assurer la sécurité des ouvriers et des occupants ainsi que la satisfaction de notre client, nous avons mis en place un contrat méthodologique. Celui-ci a permis l’optimisation des modes de construction, des modes opératoires, du planning. En parallèle, afin de gérer au mieux le chantier, nous avons missionné des prestataires indépendants pour s’assurer du respect des réglementations et améliorer au maximum la qualité de vie sur le chantier.
De même, pour limiter au maximum le bilan carbone, l’ensemble des entreprises ont été désignées en prenant en compte leur zone géographique. Nous encourageons aussi les occupants à utiliser des moyens de transport plus écologiques en mettant à leur disposition un local vélo/ trottinette permettant leur recharge.
Au-delà du local vélo/trottinette, pensez-vous que cette extension contribuera à la qualité de vie au travail des équipes d’123 IM ?
AL : Le bien être des occupants était notre plus gros challenge. En effet, les conditions de travail doivent être optimum afin que les salariés se sentent bien dans leur espace de travail.
Cette extension a permis de créer de nouveaux espaces détente, de cabines dédiées au téléphone permettant de s’isoler le temps d’une conversation qui répondent aux attentes des équipes de 123 IM. Ils pourront également profiter de l’extérieur au sein de leurs bureaux grâce à une terrasse végétalisée accessible à tous. De plus, afin de permettre aux occupants de faire du sport avant leur journée de travail ou pendant leur pause déjeuner, nous avons créé un espace vestiaire avec des douches.
Sur le plan architectural, nous avons décidé d’installer des brises vues sur la nouvelle façade qui permettront de laisser la lumière pénétrer naturellement dans le bâtiment tout en préservant l’intimité des occupants, ce qui diminue le vis-à-vis – un point important étant sur une cour entourée de bâtiments. Les salles de conférences situées au RDC pourront bénéficier aussi d’une luminosité naturelle grâce à la mise en place d’une verrière au plafond.
ML : Nous avons cherché des solutions qui soient aussi esthétiques et innovantes. Ainsi, les grandes lames verticales ne sont pas implantées avec un rythme régulier mais au contraire avec un rythme « accéléré » : plus les lames se rapprochent de la parcelle voisine, plus elles sont resserrées, empêchant ainsi les vues latérales et assurant une confidentialité et une intimité vis-à-vis des tiers.
A l’inverse le rythme se ralentit vers l’immeuble haussmannien lui-même reliant les équipes de 123 IM se trouvant dans la nouvelle zone à celles dans le bâtiment historique.
En plus de ce rôle de brise-vue, les lames empêchent aussi les apports de chaleur sur la façade limitant quasiment totalement les impacts solaires sur le mur rideau. Néanmoins les lames viennent capter la lumière extérieure qui est réverbérée vers l’intérieur. Enfin, la couleur dorée des lames donne une lumière intérieure chaleureuse.
A l’usage, lors des premières semaines d’exploitation des nouveaux bureaux, les équipes indiquent déjà avoir beaucoup moins besoin d’allumer la climatisation, même pendant les journées chaudes et ont très vite adopté les nouveaux espaces, tant intérieurs qu’extérieurs – l’objectif du bien-être semble donc atteint.